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Troubles digestifs : un conseil à risque chez le lapin
Nombreux sont les pharmaciens consultés pour de petits élevages familiaux de lapins. Ce conseil occasionnel fait appel à des connaissances pas toujours acquises au cours des études. Face à des troubles digestifs non spécifiques du lapin, il est difficile de mettre un nom sur la maladie en cause. Votre rôle est de poser les questions judicieuses pour orienter votre diagnostic, ce qui vous permettra d’apporter un conseil efficace.
La caecotrophie, particularité du lapin
Après une prise de repas, il y a formation, au niveau du cæcum et du colon, de petites pilules, bien plus petites que les crottes normales : ce sont les cæcotrophes que le lapin recueille à l'anus et absorbe au fur et à mesure de leur émission. Ces cæcotrophes sont pauvres en débris végétaux de consistance molle, enrobés de mucus, riches en eau. Le lapin y trouve des aliments mal digérés et une abondance de corps microbiens, source de protéines, et de vitamines. La caecotrophie explique également la rapidité d’évolution des troubles digestifs.
Principales maladies digestives
1) Coccidioses
Il existe la coccidiose intestinale et la coccidiose hépatique. Suspectez la première chez le lapereau de 1 à 2 mois, si des sujets présentent de la diarrhée liquide, avec ou sans sang, un gros ventre ballonné, une prostration et une anorexie. Dans les formes chroniques, les symptômes sont moins spécifiques et le diagnostic doit faire appel au laboratoire. La coccidiose hépatique touche les animaux plus âgés. Pas de signes clairs.
2) Infections bactériennes
- Entérotoxémies. Provoquées par Clostridium, elles touchent principalement les lapereaux de 8 à 30 jours, les mères dans les 2 à 8 semaines après la mise-bas, les reproducteurs et les lapins en fin d'engraissement. Suspectez cette affection pour les sujets à risque qui présentent ballonnement, hypothermie, diarrhées hémorragiques, arrêt de la lactation, abandon des petits... - Typhlite. Cette inflammation du caecum (origine complexe) touche les lapins en cage, entre 6 et 10 semaines, la diarrhée est brutale de couleur brun-noir.
- Entérites mucoïdes. Suspectez la maladie, surtout chez les lapereaux entre 5 et 7 semaines, à la période du sevrage et de la transition alimentaire qui suit le tarissement du lait de la mère, lors d'émission d'une diarrhée gélatineuse.
- Maladie de Tyzzer. Cette affection touche les animaux de moins de 12 semaines et les lapines après la mise-bas. Suspectez-la lors de diarrhée aqueuse, incoercible avec abattement et anorexie.
- Colibacillose. Ces infections touchent les lapereaux de moins de 15 jours au nid. Ces derniers présentent une forte diarrhée. Les colibacilles peuvent jouer un rôle secondaire dans de nombreuses pathologies digestives.
3) Vers du tube digestif
Les parasites les plus fréquents chez le lapin sont les oxyures. On trouve aussi des ténias, des strongles gastriques et des trichostrongles. Les signes d'alarme sont diarrhée et amaigrissement.
4) Troubles alimentaires
Les sous-produits de la consommation familiale inadaptés, les transitions alimentaires brusques et le manque de fibre dans la ration (besoin en cellulose : 16 à 20 % dans la ration) sont à l'origine de diarrhées.
Votre conseil produits
1) Anti-coccidiens
Dans l'attente du diagnostic, certains vétérinaires conseillent des traitements non spécifiques à base de sulfamides qui seront à la fois anti-coccidien et anti-infectieux. L'association trimétoprime et sulfadiméthoxine administrée pendant 5 jours est la plus courante et la plus économique. La posologie de base de la sulfadiméthoxine est de 1g par litre d'eau de boisson les deux premiers jours puis 0,5 g/ litre pendant 3 à 5 jours suivants (Amidurène 1 cuillère à café dans 2.5 litres d’eau de boisson). La grande régularité du traitement est une condition essentielle de son succès total.
Le traitement préventif évite la mortalité par coccidiose. Conseillez de le pratiquer tous les deux jours dès la sortie du nid et jusque vers l'âge de 10 semaines. Vous pouvez également conseiller de pratiquer des rotations d'espèces (les coccidioses sont très spécifiques) et une désinfection avec Oo-cide. L'éleveur peut aussi bien aérer la litière et éviter un excès d'humidité favorable aux coccidioses.
2) Anti-infectieux
Les spécialités à large spectre, comme l'association triméthoprime et sulfamide, les fluoroquinolones, les tétracyclines sont efficaces pour contrôler les infections digestives. Il existe des spécialités à action plus spécialement digestives comme celles à base de colistine et de DH streptomycine. Une antibiothérapie à base de DHstreptomycine, un complexe vitaminé ainsi que du vinaigre dans l'eau de boisson sont indiquées pour les entérites mucoïdes. Evitez absolument l’ampicilline et autres bétalactamines.
En pratique, la plupart des anti-infectieux sont distribués dans l'eau de boisson, 4 à 7 jours de suite. Le temps d'attente doit être systématiquement indiqué. Rappelez à toute l’équipe officinale qu’aux termes de la loi, tous les anti-infectieux doivent être délivrés sur prescription vétérinaire.
3) Vermifuges
Les produits les plus utilisés sont le lévamisole, la pipérazine et le niclosamide. Essayez de les conseiller en prévention plutôt qu'en traitement d'urgence.
4) Entérotoxémie
Les carences alimentaires favorisant l'entérotoxémie, I'administration de calcium, de phosphore et d'oligo-éléments, au moyen de Lactacal à raison d'une cuillerée à café par 10 litres d'eau de boisson (ou 1 ml pour 2 litres d'eau) pendant les périodes à risque. L'intervention au niveau du régime alimentaire se fera par rationnement des granulés et distribution de céréales tout en évitant les fourrages trop riches. A cela, certains vétérinaires préconisent des molécules connues pour leur activité anti-anaérobies dont le dimétridazole. Son emploi pendant 5 jours permet d'enrayer assez régulièrement l'enterotoxémie sous réserve de la modification des causes déclenchantes.
5) Alimentation et compléments alimentaires
En cas de diarrhée, conseillez une diète à base de foin avec de l’eau pendant 24 heures. Par la suite vérifiez avec le propriétaire les bases de l’alimentation du lapin : granulés, fruits et légumes frais (salade, pomme,…) en quantité raisonnable. Il est primordial de lutter contre la déshydratation car ces animaux fragiles y sont particulièrement sensibles. Certains conseillent l’ajout de vinaigre (10 ml par litre d'eau de boisson pendant 3 à 7 jours). Pensez à proposer un complément en vitamines et oligo-éléments. Parfois il est utile d'administrer un pansement intestinal comme le Smectivet.
Retenez que de nombreux problèmes digestifs sont directement liés à l'émotivité, à des régimes trop pauvres en fibres et à des troubles de la flore bactérienne intestinale dont l'importance est cruciale (attention aux antibiotiques). La prise en compte de toutes ces informations vous permettra de vous y retrouver dans ce domaine fort touffu. C'est maintenant à vous d'approfondir ce domaine si votre clientèle est en demande.
Produits à avoir en stock
Votre stock doit inclure les compartiments suivants :
1) Anticoccidiens : Amidurène, Métoxyl, Nemaprol, Baycox 2,5 %, Cevazuril 25 mg/ml...
Triméthosulfa S…
2) Antibiotiques : Acti tetra B, Acti Coli B, Cofamix,…
3) Vermifuges :
— Pipérazine : Soluverm, Polyvermyl, Pipérazine 35 Coophavet...
—Teniverm 0,5 et 3,0 à base de niclosamide, interdit chez les volailles destinées à la consommation humaine et indiqué chez les volailles d'ornement, réalise toujours des ventes importantes.
— Vermifuges pour chats et chiens : Plurivers sirop
— Vermifuges et APE en spot-on sur prescription hors AMM : Advocate petit chat et furet 40 + 4 mg, Chanhold 15 mg, Stronghold 15 mg…
4) Compléments minéraux et vitaminés : Biovitase Lactacal, Tonivit, Vitavia, Vitavil aminé…
5) Aliments complémentaires troubles digstifs : Fibreplex, Oxbow critical care, Intestopro...
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