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Vétérinaires animaux de production : modèle économique en péril
Au cours d’une matinée organisée par le syndicat national des vétérinaires conseils (SNVECO), les vétérinaires engagés en production animale ont avancé des réflexions pouvant conduire à un nouveau modèle économique.
Le problème des vétérinaires de ce secteur est bien connu : ils n’arrivent pas à à faire rémunérer leurs conseils par les éleveurs. D’où une crispation sur la vente des médicaments et autres produits avec une forte tendance à éliminer la concurrence par le pouvoir « magique » de l’ordonnance (postérieure à la vente).
Frédéric Bizard, vétérinaire, économiste, spécialiste des questions de protection sociale et de santé, a dressé un tableau assez sombre du futur : « quelle que soit le domaine d’exercice, le métier traditionnel du vétérinaire est mort économiquement dans dix ans ». Selon lui, le modèle économique actuel, basé sur le couplage prescription-délivrance n’est pas la bonne solution — ce que les pharmaciens n’ont cessé de répéter depuis plus de dix ans. « Le couplage arrange tout le monde (pouvoirs publics, vétérinaires, éleveurs, laboratoires pharmaceutiques), mais conduit à une impasse », a insisté Frédéric Bizard, tout en reconnaissant l’importance du médicament pour le revenu du vétérinaire en production animale.
Mais la chute des ventes, liées à la fois à la lutte contre l’antibiorésistance et à d’autres facteurs économiques, tire vers le bas les revenus vétérinaires issus de la vente des produits. Ce consultant a souligné la paupérisation de la profession vétérinaire. Dans l’avenir, cette évolution conduit logiquement à : « sortir de cette situation d’apparence gagnant-gagnant » par une approche médico-économique visant à privilégier la gestion des domaines de compétence émergents. Il s’agit de basculer du curatif au préventif, sans perte de revenus. Frédéric Bizard a mis en avant trois domaines d’expertise du vétérinaire qui sont des sources de revenus pour l’avenir :
– l’environnement : Il s’agit de réussir à intensifier l’élevage (18 % des émissions de gaz à effet de serre) afin de nourrir une population mondiale en croissance, tout en réduisant son impact environnemental ;
– la biosécurité : le vétérinaire doit réussir à valoriser le conseil au regard « des coûts évitables ». Par exemple, 4 millions d’animaux ont été abattus et 250 millions d’euros, débloqués par l’État suite aux deux crises d’influenza aviaire de 2015 et 2016.
– le bien-être animal : c’est une demande sociétale forte. « Aujourd’hui, il s’agit de franchir une nouvelle étape pour aboutir à des systèmes d’élevage qui non seulement limitent au maximum les sources de stress et de douleur pour les animaux, mais favorisent aussi leurs expériences positives », a expliqué Frédéric Bizard.
Les vétérinaires devront aussi apprendre à travailler à égalité avec d’autres savoirs, indispensables pour ces nouveaux marchés. Si les vétérinaires réussissent leur transition vers ce nouveau modèle économique, les pharmaciens pourraient revoir fleurir des ordonnances en production animale et jouer enfin leur rôle dans la concurrence pour la dispensation des médicaments vétérinaires, comme l’avait souhaité le législateur.
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